Pour lutter contre les cancers, il existe plusieurs stratégies thérapeutiques parmi lesquelles existent la radiothérapie : la thérapie par les radiations. Bien que cette thérapie ait démontré une meilleure prise en charge des patients, elle génère des effets secondaires qui peuvent laisser des séquelles. Comment le thé pourrait limiter ces effets indésirables ? Est-ce qu’il en limite aussi les effets bénéfiques ?
Les rayonnements ionisants pour détruire les cellules cancéreuses.
La radiothérapie se base sur l’utilisation de radiations ionisantes (rayons X, source radioactive, ions carbone, etc). Les rayonnements sont dirigés directement contre la masse tumorale et vont détruire directement les cellules cancéreuses. La destruction sera directe mais aussi indirecte : les rayonnements engendrent une décomposition chimique de l’eau entourant les cellules. Des molécules appelées radicaux libres vont être générés, elles sont très toxiques pour les cellules. Cependant, les radiations émises traversent aussi le tissu sain. Ces phénomènes se manifestent physiquement par une grande zone inflammatoire, qui s’étend parfois bien plus loin que la zone irradiée, et peut provoquer une nécrose des tissus.
Les antioxydants du thé : une relation chien et chat avec les radicaux libres ?
Le thé vert contient des molécules avec un potentiel antioxydant élevé : les catéchines. Ces molécules sont capables de se lier aux radicaux libres ce qui prévient leur action sur les cellules de l’organisme.
Xie et al. ont constaté que des cellules intestinales saines irradiées et traitées à un dérivé d’EGCG (catéchine) subissaient moins de dégâts (mortalité, expression de facteurs inflammatoires et réponses aux radicaux libres) que les cellules seulement irradiées. Il y aurait donc un effet protecteur de ce type d’antioxydants sur les cellules saines. De plus, les auteurs de cette étude ont observé que des souris consommant ce dérivé d’EGCG pendant un protocole d’irradiation ne présentaient pas de destruction du tissu intestinal sain (population de cellules inchangées, pas de nécrose tissulaire, maintien de l’intégrité du tissu intestinal).
Ces résultats sont plutôt intéressants pour la protection du tissu sain lors de la radiothérapie, pourtant il faut se demander si cela réduit les effets thérapeutiques sur les cellules cancéreuses. Par exemple, Thomas et al. ont démontré que des cellules de cancer de la prostate irradiées mourraient plus que des celules irradiées et traitées à l’EGCG. Il semblerait que l’augmentation des marqueurs de réponses aux radicaux libres dans les cellules cancéreuses soit dûe à l’EGCG et réduit les effets de la radiothérapie. A l’inverse, une revue de la littérature réalisée par Yuan et al. rapporte que les polyphénols du thé n’affecteraient pas l’efficacité de la radiothérapie tout en limitant les effets secondaires sur les cellules des cancers nasopharyngées.
Il est très difficile de comparer l’ensemble des publications sur la radiothérapie car trop de paramètres peuvent varier. Tout d’abord, la source de rayonnements et la manière de les générer conditionnent les effets qui se produiront. Ensuite, la dose délivrée, mesurée en Gy, va aussi conditionner la réponse des cellules. Certaines cellules sont capables de résister aux fortes doses délivrées comme certaines tumeurs cérébrales tandis que d’autres n’y résisteront pas. L’étude de Thomas a utilisé une dose de 3,5 Gy (soit 1,5 Gy de plus que ce que l’on peut trouver en clinique par jour) alors que Xie a utilisé des doses de 2 à 9 Gy.
Quand l’idée arrive en clinique …
Bien que les résultats dans la littérature puisse être contrasés dans les études in vitro et in vivo, la prise d’EGCG au cours d’un traitement de radio-chimiothérapie fait actuellement l’objet d’une étude clinique (actuellement en phase II) sur le traitement de tumeurs du poumon (à non petites cellules) de stade III. Les résultats de la première phase de développement clinique ont été publiés en 2014 et semblent indiquer que les patients ayant reçu l’EGCG en application sur la peau traversée par les rayons en plus du traitement conventionnel présentaient une diminution de l’inflammation du tissu oesophagien induite par la radio-chimiothérapie et présentaient une régénération plus rapide des tissus endommagés. De plus, les auteurs n’ont pas constaté de diminution de l’efficacité du traitement sur ces tumeurs comparés à certaines études in vitro.
Plusieurs questions se posent alors : est-ce la dose en polyphénol qui est importante ? Les conditions d’irradiation ? le contexte physiologique (cellules seules vs organisme entier) ? Polyphénol isolé ou infusion de thé ? Il va falloir encore attendre un peu avant d’avoir ces réponses !
Comentarios